LE CORPS N’OUBLIE RIEN, NEUROFEEDBACK DYNAMIQUE et le SSPT
Le Corps n’oublie rien
Grâce à plusieurs clientes, j’ai eu la chance de lire la traduction le corps n’oublie rien du fameux livre The body keeps the score du docteur Bessel van der Kolk. La version originale, parue en 2014, a eu un retentissement considérable aux États Unis puisqu’elle est devenue un best-seller. La traduction française, parue l’année 2018, n’est pas en reste et le docteur Bessel van der Kolk était à Paris en septembre dernier pour une conférence à l’hôpital Saint Anne.
Le docteur Bessel van der Kolk est un psychiatre américain d’origine néerlandaise, spécialiste du syndrôme de stress post-traumatique (SSPT), professeur de psychiatrie à l’université de Boston et fondateur du Trauma Center de Boston.
Fort de sa pratique clinique de plus de 30 ans, de ses réflexions et des avancées en neurosciences, l’auteur nous éclaire sur l’impact des traumatismes (guerre, violences éducatives, viol, attentat, accident, catastrophe naturelle… ) sur le corps, l’esprit et le cerveau. Il met également l’accent sur le fait que la psychiatrie actuelle ne tient pas suffisamment compte des traces laissées par les traumatismes subis par les personnes qui consultent. Plutôt que des médicaments ou la parole, le docteur Bessel van der Kolk suggère de porter l’attention sur le corps.
Tout au long de sa carrière, il a innové et s’est approprié toutes sorte de thérapie ou de techniques (l’EMDR, le yoga, le neurofeedback, le théâtre…) qui ont permis à un grand nombre de ses patients de surmonter leurs traumatismes, d’avancer dans leur vie et surtout de retrouver goût à la vie. Ce livre est un formidable message d’espoir qui a d’ailleurs incité quelques personnes à pousser la porte de mon bureau.
Pendant ses études de médecin le docteur Bessel avait été amené à enregistrer et analyser les électroencéphalogrammes de participants pour une étude sur le sommeil.
Au début de sa carrière (dans les années 80), dans l’espoir que l’analyse de l’EEG puisse aider à poser un meilleur diagnostic, il envoyait presque systématiquement ses patients faire cet examen. Néanmoins, les résultats des EGG ne lui apprenant finalement pas grand-chose sur ses patients, il y renonça, sauf à quelques exceptions.
C’est en l’an 2000, qu’une étude, sur la différence de traitement de l’information entre les traumatisés et les personnes ‘normales’, a, à nouveau, attiré son attention sur l’intérêt de l’analyse de l’activité électrique du cerveau. Les résultats de cette étude lui ont fait penser à ce qu’avait écrit Janet[1]en 1889 : « le stress traumatique est une maladie qui consiste à ne pas pouvoir être pleinement vivant dans le présent ».
Puis, en 2007, l’auteur a fait la connaissance de Sebern Fisher[2]ancienne directrice d’une clinique pour adolescents gravement perturbés et praticienne de neurofeedback. Après lui avoir montré les effets positives du neurofeedback sur de jeunes clients en très grande difficultés, le docteur Van der Kolk a été époustouflé « Je n’avais jamais vu de traitement qui puisse apporter un changement aussi rapide dans le fonctionnement psychique ». Intrigué, il se rendit au cabinet de Serbern Fisher dans le Massachusetts pour en savoir plus et en faire l’expérience lui-même. Sebern Fisher s’était également arrangée pour lui présenter trois de ses patientes dont les histoires étaient toutes remarquables. Convaincu de l’énorme potentiel de la méthode pour libérer l’esprit de traumatismes, il décida de se former, ainsi que son équipe du Trauma Center, afin d’inclure le neurofeedback dans son travail de thérapeute.
Lorsque mes clientes, présentant un syndrome de stress post-traumatique, sont venues me voir pour la première fois, à la suite de leur lecture de ce livre (ou bien à la suite de leur écoute de la conférence du docteur Bessel van der Kolk en septembre) j’ai été très transparente. La méthode de neurofeedback qu’elles s’apprêtaient à découvrir était radicalement différente de celle décrite dans le livre.
Le neurofeedback dynamique
La méthode de neurofeedback dit ‘dynamique’ que je pratique a été conçue dans le souci de prendre en compte la nature dynamique du système nerveux central, par les algorithmes choisis pour traiter les signaux électriques, et également dans celui d’en faire une utilisation simple, accessible à tous et sans risque d’effet secondaire.
Lors des séances de neurofeedback dynamique, vous êtes confortablement installé chez un praticien ou bien même chez vous. En plaçant 2 capteurs sur le cuir chevelu et 3 clips sur les oreilles, le système enregistre et analyse en temps réel les signaux émis par l’activité électrique de votre cerveau pendant l’écoute d’une musique ou le visionnement d’un film. Simultanément, le logiciel de neurofeedback se charge de détecter tous les changements dans l’activité électrique de votre cerveau et de vous en faire part par une brève interruption de son. C’est cette pause du son qui représente un ‘feedback’ (un retour d’information) sur votre propre fonctionnement. Ainsi alerté sur ce qu’il vient de faire, le cerveau est encouragé à mieux s’auto-réguler et à se diriger vers un mode de fonctionnement plus confortable, détendu et efficace.
Bien informées et la première séance passée, mes clientes ont décidé de poursuivre l’expérience. Après quelques séances, l’une d’entre elle, thérapeute spécialiste en EMDR, a même décidé de se former et d’inclure ce merveilleux outil dans sa pratique.
Le syndrome de stress post-traumatique (SSPT)
Astrid[3], la première cliente m’ayant parlé du livre, souffrait d’un syndrome de stress post-traumatique (SSPT) très bien identifié. Depuis qu’elle avait subi un choc émotionnel, trois ans auparavant, elle dormait très mal. Elle était au bout du rouleau lorsqu’elle vint me voir pour la première fois. Au bout d’une dizaine de séances son sommeil est redevenu complétement ‘normal’ même dans un environnement stressant. Quand bien même, il lui arrive d’ouvrir un œil de temps à autre, son cerveau, en quelques secondes, fait un rapide tour d’horizon, constate qu’il n’y a pas lieu de se lancer dans des ruminations inutiles et elle se rendort.
Au début de l’entrainement, elle a senti que son sommeil, toujours perturbé, était néanmoins plus réparateur. Moins fatiguée et irritée, encouragée par ses ressentis positifs, elle a redécouvert son goût pour la musique et s’est remis à écouter de la musique.
Je peux témoigner qu’elle se sent d’autant plus soulagée et heureuse de se sentir libérée de ses insomnies qu’elle est aujourd’hui enceinte de 3 mois. Ne prenant cependant pas les choses pour acquises et souhaitant avoir une grossesse aussi sereine que possible, elle a décidé de poursuivre l’entrainement une fois par mois.
Pour Clara, la deuxième cliente m’ayant consultée suite à sa lecture du livre, il n’y a pas de doute. Selon elle, c’est bien l’entrainement de neurofeedback dynamique qui lui a permis de tomber enceinte pour la 2 éme fois.
Clara voulait tester cette méthode car il lui arrivait d’éclater en quelques secondes dans une rage incontrôlée qui disparaissait aussi vite qu’elle apparaissait particulièrement dans des situations d’incompréhension avec son époux. Même si ces crises n’étaient pas très fréquentes, en tant que Maman d’une fillette d’un an et demi et épouse aimante, elle ne voulait plus rentrer dans cet état dans lequel elle ne se reconnaissait pas. Elle soupçonnait bien que cette colère excessive provenait d’un traumatisme lié à un comportement de sa mère lorsqu’elle était petite. Ne sachant pas quoi faire de cette information et voulant avancer sur ce sujet, elle décida de faire une dizaine de séances. Très disciplinée, elle venait régulièrement s’entrainer et était ravie de l’apaisement qu’elle ressentait et remarqua, effectivement, qu’elle gérait mieux ses émotions.
Lors de sa 7ème séance, en décembre dernier, elle m’informa qu’elle se sentait un peu fatiguée. Et pour cause ! Elle ne résista pas à l’envie de m’annoncer, bien avant les 3 mois ‘fatidiques’, qu’elle était enceinte. C’est ainsi que j’ai appris qu’elle et son mari avaient eu recours à une fécondation in vitro pour concevoir leur premier enfant. Depuis le mois de juin, son mari suggérait que le moment était venu de prendre RV avec les médecins pour une deuxième grossesse. Début novembre, quelques semaines après le début de son entrainement, elle lui annonça triomphalement que le bébé était en route naturellement !
Très récemment, ce sont des recherches sur internet qui ont conduit un jeune capitaine de l’armée à venir faire des séances avec moi. Depuis, qu’il a subi une blessure de guerre il y a huit ans, il souffre d’un syndrome de stress post-traumatique qui inclut un certain nombre de préoccupations tels qu’une grande fatigue, des troubles du sommeil, de l’humeur, de l’anxiété et une consommation excessive d’alcool. Ce jeune militaire avait pu faire une dizaine de séances 2 ans auparavant et avait beaucoup apprécié la détente qu’il avait alors ressenti. Muté ailleurs il n’avait pas pu continuer son entrainement.
Se rendant bien compte que l’entrainement précédent n’avait pas été suffisant pour établir de changements durables, il a repris les choses en main en venant me voir. Lors de la deuxième séance, il m’explique que les 5 jours qui avaient suivi la première s’étaient très bien déroulés. Il s’était senti beaucoup plus réceptif et réactif dans son travail, avait pu consommer ‘normalement’ de l’alcool entre amis (son épouse avait même été étonnée de réaliser qu’elle n’avait pas eu besoin de cacher les bouteilles de vin ouvertes pendant le week-end, ce qu’elle avait pris l’habitude de faire !) et la ‘boule’ au ventre qu’il avait lors de la première séance avait disparu. Cet état de mieux être est retombé le 6 ème jour et il était soulagé à l’idée de faire sa 2 éme séance.
Comme le résume si bien le docteur van der Kolk, le neurofeedback est une méthode aussi enthousiasmante qu’innovante qui contribue considérablement à se sentir pleinement vivant et présent à chaque instant.
[1]Pierre Janet est une figure majeure de la psychologie française du XIXe siècle.
[2]Fisher a énormément contribué à la diffusion du neurofeedback grâce son livre Neurofeedback in the treatment of developmental trauma, Norton, 2014.
[3]Les prénoms ont été changés